Je vois, je vois...je vois plus rien.[PV Luka]

Le monde n’est que paix et amour. Il n’est fait que de quatre éléments complémentaires qui vivent en harmonie à travers le temps. Il y’a le feu, l’eau, la terre et l’air. Zénith était semblable au feu. Aussi brûlant et imprévisible. Définir la jeune femme n’est pas chose aisée et même ses proches ont parfois du mal. En fait les deux seules personnes au monde capable de deviner les intentions de Zénith cinq minutes avant qu’elle ne décide de les mettre en pratique sont Charlie et Nathan. Charlie est sa grande sœur, celle sur qui elle peut compter en toutes circonstances. Nathan est quant à lui son ange gardien, ou son meilleur ami. Qualifié-le de ce que vous voulez, cela n’a aucune importance.
Autrefois, elle vous aurait dit que Luka aussi faisait partie de ses personnes si importantes à ses yeux qu’elle se serait enrôlée dans cette foutue armée si leur vie en dépendait. Mais plus maintenant. En fait il pouvait lui arriver tous les malheurs du monde que sa vie à elle ne s’en porterait pas mal pour autant. Oui enfin ça c’est en théorie. Pourquoi n’avait-elle pas écouté sa sœur ce jour là ? Pourquoi était-elle sortit avec ce gars qui trouvait que la paix dans le monde n’était pas la chose la plus essentielle ?

Dix heures venaient de sonner à la pendule du salon et Zénith ne bougeait toujours pas . Allongée sur le canapé les pieds pendant par-dessus l’accoudoir elle grogna quand la chose qui se trouvait par terre s’agrippa à elle. Nathan n’était jamais tranquille, il fallait toujours qu’il s’en prenne à elle. Alors qu’elle tentait de se retourner afin d’enfouir son visage dans les nombreux coussins, et accessoirement ignorer les protestations de Nate, la jeune femme glissa et se retrouva allongée sur Nathan. Elle ne s’en formalisa pas pour autant, les yeux encore fermés elle chercha à tâton la couverture qu’elle avait depuis toute petite. Cette couverture était pour ainsi dire l’un des biens les plus précieux de Zénith bien qu’elle ne soit plus en aussi bon état que dans le passé. En effet depuis son huitième anniversaire elle est entièrement recouverte des empreintes de mains de Nathan et Zé. Ce trésor elle le garde au fond de l’armoire et ne la ressort que lorsque Nate est chez elle. C'est-à-dire quasiment toujours bien que le reste du temps elle crèche chez lui. Il lui arrive aussi de s’enfermer dans son armoire et de s’endormir à même le plancher enroulée dans la dite couverture. Mais ça c’est seulement les soirs d’orages quand elle a trop peur de traverser la rue pour se réfugier dans les bras de son ami et ainsi tester son nouveau matelas – tant qu’à faire. Quand sa main tomba sur le morceaux de tissus elle s’enveloppa dedans cachant par la même occasion son ange gardien. Bercée par la respiration régulière de Nathan, elle ne tarda pas à retomber une nouvelle fois dans les bras de Morphée et ce n’est que trois plus tard qu’elle se réveilla son estomac étant tiraillé par la faim. Doucement elle se leva de son matelas de fortune pour venir s’installer sur la table de la cuisine une pomme dans la main. Elle savait que d’ici dix minutes le père de Nathan appellerait pour qu’il rentre. Elle avait été prévenue la veille qu’ils ne passeraient pas la journée ensemble. Alors qu’elle croqua dans le fruit, le téléphone se mit à sonner une fois : c’était le signal. Quelques minutes plus tard un Nathan pas encore tout à fait réveillé ni même tout à fait habillé fit son entrée dans la cuisine. Il partit tout aussi directement qu’il était rentré non sans avoir déposé un baiser sur le front de Zezette. Accoudée à sa fenêtre elle s’amusa de voir son ami titubait dans la rue tout en enfilant ses dernières affaires. Elle secoua la tête avant de penser à la journée chiante qui l’attendait.

Elle remit la robe de la veille et après avoir emprunté une rose du jardin de sa mère elle quitta le quartier direction le Marina Museum. Depuis quelques temps la jeune femme avait des idées révolutionnaires en matière d’art. Par exemple elle avait pensé à sculpter deux personnes copulant sur la banquette arrière d’une voiture [cassdédi Popol ]dans un gratin de patte. Ca ferait sensation c’était certain. D’un pas guilleret elle rentra dans le grand musée tout en remettant en place les multitude de marguerite qu’elle s’était mise dans les cheveux. Alors qu’elle apprécia d’un regard critique la reproduction quasiment grandeur miniature d’un bateau, la jeune femme trébucha contre l’un des nombreux bancs mit à disposition. A présent allongée sur le sol elle plaqua une de ses mains sur son front avant de jurer.

On fait tout par intérêt. Il y a toujours un motif caché derrière tout ce que vous faites. Et même si vous l’ignorez, dites vous que c’est votre inconscient qui marche, mais on ne peut rien faire sans que ça nous rapporte quelque chose, à long terme ou pas, il faut toujours y trouver son compte. C’est un peu le mode de vie de Luka Stevenson, ce grand jeune homme tout juste âgé de 19 ans. Et on peut dire que le passé de ce dernier est bien fourni. Il a accumulé les erreurs, et a finit par les transformer en choses qui pourraient lui servir, dans son intérêt. La seule chose qu’il n’avait pas pu maitriser, c’était l’amour qu’il avait pu ressentir pour une seule personne : Zénith. Et pourtant, il n’avait jamais su lui dire, et il avait encore moins compris quand elle se décida à le larguer. Elle avait simplement eu la même excuse que sa sœur Charlie, autrefois sa copine. C’est vrai tous les deux n’étaient pas sur la même longueur d’onde, elle prônait la paix dans le monde, tandis que lui voulait à tout prix voir le monde progresser en pleine guerre froide, et en pleine mondialisation. Il n’avait pas eu de mal à se remettre de cette séparation, il avait toujours encaissé sans rechigner, mais à chaque fois qu’il l’a recroisait c’était différent, il cherchait à lui reparler, mais au contraire, la jeune femme voulait qu’il la laisse tranquille. Il ne renonçait pas, mais avec tact…Elle pouvait bien lui envoyer son meilleur ami, il en avait rien à foutre de Nathan, il lui casserait la gueule avant même qu’il n’ait compris ce qui lui arrivait. Jaloux le jeune Stevenson ? Non…Rien qu’un peu !

C’était une journée pour lui des plus ennuyeuses… En effet, sa’ nounou’ ou nourrice prenez le comme vous voulez, dut l’éveiller à 11heures tapantes, par la faute du père du jeune serbe, qui bien évidemment lui avait concocté un programme pour la journée, afin d’éviter que son fils passe la journée à coucher à droite et à gauche. Depuis un moment, il voulait que son fils gagne en maturité, et évite les erreurs stupides, c’est pour cette raison, que le programme d’aujourd’hui était clair…Il devait aller s’aérer la tête au Marina Museum. Et quelle fut la réaction du garçon quand il apprit cette magnifique nouvelle ! Les papiers volèrent en éclat à travers la maison, tellement que la nourrice eut un petit peu peur de Luka, qui arrêtait pas de râler… Tout propre après sa douche, il était vraiment de mauvaise humeur…Que pouvait-il bien faire là-bas dans ce musée inutile ? Aucune idée, il attrapa au vol son sac avec son carnet de dessins à l’intérieur, et partit sans même prendre la peine de déjeuner, ni de dire au revoir à sa nourrice, celle qui remplaçait si bien sa mère dans la maison, mais malheureusement pas dans le cœur du garçon. Sa besace accrochée à son épaule, il passa par la boulangerie si connue de San Francisco et y acheta une viennoiserie, et il la mangea sur un banc, croisant le regard d’un garçon d’une dizaine d’années, qu’il fusilla du regard, il avait horreur qu’on l’observe en train de manger.

Une fois son petit déjeuner fini, il se leva, se frotta les vêtements pour lever les miettes, et s’en alla d’un pas rapide vers le musée. Plus vite il avait fini mieux c’était. Il emprunta un petit chemin qui menait vers le musée, et y pénétra. Ce musée était louche, c’était un bateau, qui avait eu cette ingénieuse idée de foutre un bateau en pleine ville ? Pas lui en tout cas. Mais alors qu’il regardait rapidement les merveilles qui s’offraient à ses yeux, sans y prêter beaucoup attention, il remarqua une personne qu’il avait très envie de voir depuis des lustres, mais qui par pur respect, n’osait approcher. C’était bien entendu Zénith… Elle avait l’air de flâner…Il l’observer, quand tout à coup elle trébucha sur un banc qui était présent à ce moment là. Assistant à la scène, débordant d’humour, Luka lâcha un petit rire, et alla retrouver Zénith, lui tendant la main, pour l’aider à se relever.

« Alors Zénith on ne regarde plus où on met les pieds ? Encore heureux que tu ne te sois pas pris le banc en pleine face, tu aurais l’air encore plus maligne ! Tu devrais faire plus attention, surtout dans…cette épave… »

A présent il la regardait un sourire sur le visage, il savait bien qu’elle n’accepterait surement pas sa main, pour se relever surtout après ce qu’il lui avait balancé, mais c’était un risque à prendre avec elle, il savait très bien qu’il fallait s’attendre à une mauvaise réaction de sa part, mais à quoi bon rester loin…Pour une fois qu’il n’y avait pas Charlie dans les parages, elle était livrée à elle-même, et il pouvait enfin lui adresser la parole.

Zénith était ce que l’on appelait une hippy pure et dure. Si elle en avait le pouvoir elle couperait sa longue chevelure brune et l’échangerait contre de la nourriture afin de combler la faim qui sévissait dans le monde. Elle pouvait aussi très bien se faire passer pour un mâle, se faire enrôler dans l’armée pour ensuite détruire toutes les armes des deux camps dans le simple but qu’il n’y ait plus de violence. Quand à la société qui ne devenait que consommation elle ne pouvait pas faire grand chose malheureusement. Cette idéologie elle la soutenait et ne lâcherait pour rien au monde. Elle savait que quelque part les hommes n’étaient que des crevettes dénuées de toutes envies suicidaires, qu’ils ne voulaient qu’une chose : vivre dans un monde en paix. Tous le voulaient ! Enfin à l’exception d’une personne Luka. Elle se demande encore comment elle avait fait pour sortir avec une personne pareille. Pour tout avouer, elle avait jalousé Charlie quand ils avaient été ensemble. Elle voyait en lui un mec quasi parfait, tout autant que Nate, et c’est d’ailleurs cela qui l’a poussé à tenter sa chance six moi après la fin du couple Charlie/Luka et ce, malgré les recommandations de sa chère sœur. Quelle belle erreur. Aujourd’hui on ne pouvait pas dire qu’elle le haïssait dans la mesure où elle met un poing d’honneur à tenter d’aimer tout le monde. Pour Luka c’était pareil, elle essayait tant bien que mal de faire des efforts mais c’était plus fort qu’elle. Dès qu’elle le voyait, toutes leurs différences lui sautaient aux yeux et son animosité envers lui remontait.

Elle priait intérieurement Bouddha, Dieu, Allah et même les Pink Floyd que personne ne l’ai vu. A présent repliée sur elle-même, Zénith essayait de reprendre ses esprits bien qu’elle voyait des oiseaux voleter autour d’elle. Une voix qu’elle ne connaissait que trop bien la sortie de sa rêverie. La jeune femme poussa un gémissement avant de porter son regard bleuté sur Luka. Elle se redressa quelque peu afin de s’assurer qu’il était bien là et quand ses yeux croisèrent les siens elle se laissa retomber une nouvelle fois par terre non sans grogner. Elle resta inerte quelques secondes allongée sur le sol, les bras écartés ainsi que les jambes comme si elle voulait faire un ange dans le sol.

« Critiques bien, je me vengerais »

Zénith se mit en position assise et à présent décoiffée elle poussa un profond soupir qui la fit tout de suite grimacer. Elle plaqua aussitôt une nouvelle fois sa mais à son front, geste qu’elle regretta aussitôt.

« J’ai une commotion cérébrale je vais devenir amnésique ». Elle leva la tête pour mieux voir son crétin d’ex petit-ami et fit une mine horrifiée en tendant le doigt vers son torse. « Depuis quand t’as un jumeau ?! Noooon c’est horriiible ». Elle se frotta les yeux et quand elle les réouvrit elle aperçut la main que Luka lui tendait. Elle la repoussa et tenta de se relever seule. Chose qui parut super compliquée étant donné qu’elle avait l’impression que tout bougeait. « Ils l’ont mit à l’eau ? Ca tangue drôlement ». Finalement elle accepta l’aide de Luka et une fois debout elle s’appuya contre un des pans du mur. Une bosse bleue commençait à faire son apparition sur le front de la demoiselle en partie caché sous sa chevelure.

« Qu’est-ce que tu fais là ? Généralement tu fuis ce genre d’endroit »

Pour la première fois depuis bien longtemps il n’y avait aucune animosité dans sa voix. C’était donc cela la solution ? A chaque fois qu’elle était en sa présence elle devait se fracasser quelque part.

Luka n’avait jamais manqué de rien dans sa vie, à part peut être une présence féminine dans sa maison. Certes il avait une nourrice, mais rien n’aurait remplacé sa mère. C’était pour cela que le jeune homme ne savait tout bonnement pas s’y prendre avec les femmes, il disait tout d’une franchise méprisable, et se foutait probablement des réactions à celle-ci. C’était peut être ce qui l’avait perdu avec Charlie puis Zénith…Il ne cessait de leur dire que le mouvement hippie était un mouvement stupide, qu’ils perdaient leur temps, car le progrès leur passerait bien au dessus, il fallait s’y faire, dans le monde il y avait les forts, et les faibles, relation de dominant-dominé. Mais ces paroles vénéneuses en ce temps n’étaient bien vues de personne…A croire qu’il était rejeté de tout le monde, alors il se détendait en passant à autre chose, il dessinait, jouait du piano, passait des heures à se détendre le rendait peut être un peu plus appréciable… En fin de compte, il s’en foutait, il pouvait être la pire ordure du monde, il y aurait toujours quelqu’un pour l’aduler, grâce à sa richesse, et ses mœurs bien en avance sur son temps. Certes il ne rejetait pas tout du mouvement hippie la preuve était la cadette des Weller, qu’elle mette des marguerites dans ses cheveux ne l’avait jamais gêné, bien au contraire, il s’était plu à lui remettre quand celles-ci tombaient, et qu’ils se trouvaient être encore ensemble…Ah Nostalgie quand tu nous tiens…

Quelle bonne surprise de la voir ici, finalement il allait peut être remercier son père à la fin de la journée, mais s’il lui demandait ce qu’il avait retenu de la visite, il aurait peut être menti en disant tout, mais il avait horreur de mentir, alors il aurait transformé en disant la sirène échouée sur le sol. Son père bien sur n’y verrait que du feu, et le laisserait probablement tranquille pour le reste de la semaine, une aubaine pour lui qui se disait déjà qu’il pourrait peut être inviter justement la petite sirène échouée sur le sol du musée que ce soit dans un resto ou ailleurs pour aller boire un verre…Attention Luka, les sirènes n’ont pas l’habitude de vivre sur la terre ferme, vous vivez dans un monde différent, que tu connais bien…C’était un peu ça, l’histoire de la petite sirène entre eux…Sauf que bien sur, l’amour n’avait pas été plus fort que leurs différences, puisqu’il n’y en avait qu’un dans ce bateau.

« Venges-toi et tu le regretteras. »

Leurs phrases étaient courtes, mais ne laissaient rien de bon pour la suite, aussi bien dans leur vengeance, que dans la suite de leur re-rencontre. Regarder la jeune femme s’asseoir était une sorte de supplice qu’il arrivait à contrôler, autrefois, il l’aurait relevée sans qu’elle ne le demande, mais là, il devait agir avec tact. Mais la jeune femme n’avait pas fini de s’en prendre à Luka, qui trouvait cela fort distrayant, car c’était un peu comme s’ils inversaient leurs rôles.

« Du moment que je suis là, tu ne risques pas de m’oublier, je fais autant partie de ton présent que de ton passé, dommage je sais…T’aurais préféré trouver ici le petit brun sans cervelle…C’est quoi son nom déjà ? Evers ? J’aurais plutôt dit Never pour lui ! »

Mauvaise plaisanterie de sa part, s’il continuait il allait tout le droit dans le mur, si bien qu’il se mordit la lèvre inférieure, conscient de sa pure bêtise, et marmonna :

« Hum…Excuses-moi. » Mais ses yeux s’écarquillèrent. Il ne comprit pas où elle voulut en venir. Un jumeau ? Ah non en fait elle voyait double…Il lâcha sans grande conviction : « Ouais un jumeau, et toi tu dérailles…T’as trop fumé de l’herbe ce matin ! »

Comme attendu, elle repoussa sa main, d’un mouvement saccadé, et ajoutant une petite moue comme pour montrer qu’il s’y attendait, il retira sa main, pour la replacer le long de son corps. Il éclata de rire à sa nouvelle remarque, avant de l’aider à se relever. « Oui rien que pour toi, pour que tu apprécies les joies des bateaux que tu n’as jamais pris. Idiote tu ferais mieux de t’asseoir sur le banc qui t’a fait trébucher ou tu finiras par faire un malaise ! »

Non content de voir que le dialogue était tout de même froid, il remarqua que la jeune fille avait une bosse sur le front, il approcha sa main doucement vers celle-ci, et une fois qu’il fut à la hauteur du front de la jeune femme, passa une main dans ses cheveux, pour mettre une mèche devant cette bosse disgracieuse, afin de la cacher. Puis il retira sa main aussi vite que s’il avait été pris sur le fait. C’est alors qu’elle lui demanda ce qu’il faisait ici, il lui expliqua avec un léger sourire sur le visage :

« Je te cherchais ! Non en fait mon père en a marre que je passe mes journées à ne rien faire, alors il s’est mit en tête que me faire visiter des musées serait intéressant pour ma culture… Mais je te rassure, je passais simplement en coup de vent, juste pour avoir une idée pour un nouveau dessin…Et toi que fais-tu ici ? »

Il aurait pu rajouter…à part te vautrer par terre, mais il évita, pour une fois qu’elle s’adressait à lui sans animosité, il en profitait.

« Si j’ai à regretter ma vengeance du fait que je t’ai critiqué, tu passeras un sale trois quart d’heure. » Zénith plissa les yeux en repensant à la phrase qu’elle venait de prononcer, après quelques secondes de reflexion elle secoua la tête desespérée. « J’crois que j’ai rien compris à ce que je viens de dire. »

Zénith, plus par fierté qu’autre chose, refusait l’aide de Luka. Elle était une femme libre après tout ou du moins une gamine qui essayait tant bien que mal de se persuader qu’elle était libre. Libre de ses mouvements et pensées. Comme dans un mauvais film elle avait vu sa chute au ralenti et sa rencontre peu aimable avec le sol. Elle pouvait s’estimer heureuse que sa robe ne se soit pas retrouvée sur sa tête. Oui en ce moment même c’était tout ce qui lui importait. Alors que sa tête menaçait de partir elle fusilla Luka du regard n’étant pas franchement amusée par sa blague.

« Nate a …du travail. » Oui , son père le réquisitionnait pour la journée et c’était sûrement pas pour l’amener dans une boite de striptease. « Tu changeras jamais Stevenson .» Zénith n’aimait pas appeler les personnes à qui elle parlait par leur nom. C’était un truc bien trop impersonnel. Mais voilà, en décidant de s’en prendre à Nathan, Luka avait fait le mauvais choix et Zé le traita de la même façon que lui avec son ami. Elle avait prononcé sa phrase d’un ton assez sec qu’elle n’avait pas l’habitude d’employer ce qui lui fit un pincement au cœur qu’elle se garda bien de montrer.

« Même amnésique j’ai bien l’impression que je t’oublierais pas de sitôt » soupira-t-elle avant de balayer l’air d’un revers de main pour pallier à l’excuse de Luka « C’est oublié…Lulu ». Elle accentua bien le petit surnom ridicule qu’elle lui avait donné par le passé. Surnom qu’il n’avait pas franchement apprécié et qui, pour cette raison avait poussé la jeune femme a ne l’appeler que comme ça. « Saches que pour ta gouverne, je n’ai rien fumé, enfin presque pas. » Elle fit claquer ses talons sur le sol avant de rétorquer d’un ton faussement boudeur «D’abord je fais ce que je veux d’abord ! »

Zénith voulait lui montrer qu’elle n’avait pas besoin de lui, qu’elle se débrouillait très bien sans son aide. Dégourdie comme une vieille mémé à l’arthrose fulgurante elle voulue se lever en prenant appuie sur le banc mais ses mains n’arrivaient pas vraiment à s’accrocher au rebord. Elle n’était même plus sûre que les bancs avaient des rebords d’ailleurs. Alors qu’elle allait accepter son nouveau statut de serpillière du musée, Luka vînt l’aider. Elle gratifia d’un sourire à peine perceptible avant de prendre conscience qu’elle était censée le bouder genre jusqu’à la fin de sa vie.

« Haha. Non vraiment ils veulent pas le garer ? » Oui les termes techniques de la marine et Zénith ça faisait deux. « Je suis même prête à faire le créneau moi-même. Enfin que s’ils sont assurés en fait. » Elle lui tira la langue quand il lui ordonna en quelque sorte de s’asseoir sur le banc et préféra apprécier le contact froid du mur dans son dos. Elle retint son souffle quand la main de Luka approcha de son visage. Elle avait une certaine hantise, comme par exemple, qu’il l’étrangle ou qu’il l’étouffe. Mais au lieu de cela il se contenta de cacher sa vilaine bosse. Légèrement vexée elle prit sa moue la plus boudeuse avant de rétorquer « T’as peur que je fasse fuir tous les visiteurs de musée ? »

Sa présence l’intriguait grandement, et la réponse à sa question encore plus. Elle recula un peu, trouvant que la distance qui les séparait était bien trop courte. En fait non, ce n’était pas la vraie raison. La vraie raison c’était qu’elle préférait avoir une certaine longueur d’avance s’il s’avérait que Luka avait viré psychopathe.

« Ton père n’a pas changé à ce que je vois. Toujours aussi charmant » Zénith n’avait jamais vraiment apprécié ex beau-papa trouvant qu’il prenait un peu trop de décision pour Luke. « Et t’as trouvé ton modèle ? Le vieux capitaine barbu en cire de l’entrée ou le drap accroché au baton ? » Zénith désigna une voile accrochée à un mat. Je vous l’avait dit que les termes techniques n’étaient pas son fort.
Zé passa sa main sur sa bosse d’un air distrait. A vrai dire elle ne savait pas vraiment pourquoi elle était venue ici, normalement son lieu de prédilection était le lac, pas le musée. Elle haussa simplement les épaules ne sachant que répondre. « J’avais envie de me faire un trauma crânien ». Elle commença à marcher un peu sachant très bien que Luka la suivrait et alors qu’elle contourna avec attention le banc elle se retourna brusquement. « Hé ! t’es au courant de ce qu’il s’est passé ? Les gens du futur là ? ». Sa phrase prononcée, Zé grimaça. Elle avait l’impression que son cerveau s’était retournée sous la vitesse de son changement de trajectoire.

« Trois quart d’heure ? C’est précis chez toi dis moi…Mais ce trois quart d’heure en ta compagnie ne peut être sale…si tu vois ce que je veux dire ! » Un sous-entendu pour ainsi dire, à vrai dire, il n’avait pas trop compris où elle voulait en venir, comme elle d’ailleurs, et avait prononcé cette phrase qui lui avait échappé malencontreusement. « On est deux. Des fois tu parles pour ne rien dire, t’en fais pas je suis habitué. »

Il n’était pas des plus avenants, mais c’était assez logique, il n’allait pas non plus montrer à tout le monde ce qu’il considérait comme une faiblesse : tous les sentiments qu’il éprouvait à son égard, c’était une chose qu’il avait appris à contrôler légèrement, mais parfois il oubliait bien cette volonté de le préserver de cela, et se laissait aller, or pour l’instant ce n’était pas le cas. Il tenait à Zénith bien plus qu’à n’importe qui d’autre, mais bien entendu du moment que ce n’était pas réciproque, il n’allait pas se jeter à l’aveugle dans ce petit jeu là. Encore une fois, il mesura sa jalousie qui était bien trop importante, si bien qu’il n’y avait que les excuses qui pourraient le sauver. Heureusement, elle n’en tint pas vraiment compte, du moins après cette petite phrase, à laquelle Luka rit, encore une fois sans se retenir, et ajouta :

« Oh oui, il travaille le pauvre ! C’est dur la vie ! Pas tout le monde n’a la chance d’avoir un compte en banque aussi fourni que ses placards… » Bien que sa phrase n’était pas méchante, son ton montrait évidemment qu’il se foutait bien de ce que Nathan pouvait faire, et qu’il se moquait bien évidemment de lui. Zénith lui rappela qu’il ne changerait donc jamais, il se plut alors à marquer un large sourire sur son visage, il haussa une épaule rétorquant : « Personne n’est parfait petit ange ! Chacun ses défauts ! Toi tu es une hippie, moi je suis très moqueur ! » Il avait bien évidemment accentué hippie. Oui il considérait cela comme un défaut chez elle, malgré tout il l’avait acceptée comme elle était sans lui faire la remarque, sauf quand ils se disputaient. Sentant son ton assez sec, il n’en rajouta pas, l’ambiance était trop électrique pour lui, il évitait les conflits, il préférait nettement fuir quand ça devenait trop important, ou il s’arrêtait. D’ailleurs il fit bien, car la nouvelle phrase de Zénith, lui donna légèrement de l’espoir. Elle n’arriverait pas à l’oublier…Oui mais pour quelle raison ? Parce qu’il était un anti-hippie ? A cause, ou plutôt grâce à leur relation, ou bien pour une autre raison ? Toutes ces questions restaient évidemment sans réponses, et il tenta tout de même de lui répondre, se mordillant la lèvre car surpris :

« Est-ce un compliment ? » S’il s’attardait sur le ton de la jeune femme, il aurait compris qu’il ne s’agissait pas d’un compliment, mais il préférait en avoir le cœur net. En revanche il fut écorché par le surnom employé par Zénith, il l’insupportait, il le détestait, et en plus il lui faisait mal au cœur, parce qu’il lui rappelait tous ses souvenirs, alors il soupira, avant de froncer les sourcils, et de s’énerver légèrement : « Bordel, arrêtes de m’appeler comme ça ! Tu le sais que j’aime pas ! Moi je ne t’appelles pas Stupide hippie, alors arrêtes de m’appeler par ce surnom stupide qui me renvoie à un bébé ! » La fumette n’était pas non plus le truc de Luka, bien qu’il ait déjà essayé de nombreuses fois, du moins fait mine qu’il n’avait jamais essayé, mais depuis que tous les hippies fumaient, il s’était bien ravisé de continuer. « De toute manière tu fais ce que tu veux ! mais c’est pas toi qui aime l’environnement ? En le fumant tu le dégrades… »

Comment parvenait-il a trouver ce genre de réponse en pleine conversation, rabattant encore une fois sur le sujet de leurs nombreuses disputes : les hippies. Il n’en savait rien au juste, peut-être cela lui permettait-il de comprendre mieux ce qui les avait poussés à rompre, sans comprendre que le problème venait de lui. Comme elle le disait si bien elle faisait ce qu’elle voulait, mais apparemment aujourd’hui elle ne s’en sortirait pas toute seule… Luka dut bien évidemment l’aider, ce qui ne le dérangeait pas le moins du monde, surtout que ça lui offrait en prime, un contact de plus avec Zé’. D’ailleurs en l’aidant, il resta un moment bloqué sur son regard, qu’il n’avait pas vu depuis longtemps, mais dans un élan d’intelligence, il la lâcha, et se contenta de l’écouter. Il rit une nouvelle fois : « Par pitié Zénith grandis ! On ne dit pas garer on dit accoster, ou arriver à quai, mais tu ne vois pas que c’est un musée et pas un bateau ? Rassures-moi ta chute n’a pas fait autant de dégats ! »

Puis la langue de Zénith fit son apparition, une vraie gamine, il avait raison…et pourtant c’était ce côté enfantin qui l’avait attiré autrefois. En revanche, lorsqu’il décida d’approcher sa main, il sentit Zénith se raidir, comme apeurée, c’était drôle, il ne lui avait pourtant jamais fait de mal… Puis une moue boudeuse s’en suivit, qu’elle était mignonne comme ça ! Mais il s’insurgea de sa question, elle était vexée de son geste, il ne comprit pas, c’était pour cette raison qu’il grimaça et qu’il se justifia, avec un sourire :

« Non, non je t’assure, je me disais juste qu’elle gâchait ton beau visage ! »

Il remarqua qu’elle s’était légèrement éloignée de lui, ce qui bien sur ne le vexa pas, il commençait à avoir l’habitude, il se disait que c’était déjà bien qu’elle lui reparle, chaque chose en son temps… Il s’adossa alors contre le mur, ferma un moment les yeux, pour émerger quelques secondes plus tard. Évidemment elle était d’accord avec lui sur le fait que le père de Luka s’occupait un peu trop de ce qui ne le regardait pas, mais en même temps, c’était la seule personne qui lui restait, le fruit de l’amour qu’il avait éprouvé pour sa femme. « Oui comme toujours, fidèle à lui-même ! D’ailleurs il m’a suggéré de vous inviter à diner, il aime bien ta famille, je lui ai simplement répondu que nous n’avions plus aucun contact. »

Sa phrase était très équivoque, il est vrai qu’ils ne se parlaient plus trop, mais on pouvait également l’interpréter par des contacts physiques, chose qu’il n’aurait pu dire autrement bien sur. « Non je n’étais pas intéressé par le Capitaine Haddock, ni même par le bateau de Capitaine Crochet, mais j’ai trouvé un modèle marrant : la chute de Zénith ! Mais je ne pense pas que je le dessinerais, il ferait tâche parmi le reste. » Il lui fit un petit sourire, il éviterait en revanche de lui montrer ses œuvres d’art qui pouvait perturber son esprit enfantin.

C’est alors qu’elle décida de changer d’endroit, en commençant par marcher, ou plutôt tituber dans son cas, bien sur Luka d’un pas sur et calme, la suivit, sans rester à sa hauteur, elle pourrait le prendre mal. Puis le sujet dériva, bien sur, sur la pseudo arrivée des gens du futur, Luka n’en croyait mot. Alors il lui répondit : « Ouais j’en ai vaguement entendu parler…Pour moi ce ne sont que des balivernes, je suis sur que ce ne sont que des gens qui sont venu d’une autre partie du monde, d’un autre continent, et qui pour se rendre intéressants racontent des conneries…Pourquoi t’as eu affaire à l’un d’entre eux ? » Il gardait un air sérieux, mais avait bien remarqué que Zénith ne se sentait pas bien, si bien qu’il lui attrapa la main, et se risqua à l’emmener de force vers un banc. « Quand on n’est pas en état de marcher, il faut s’asseoir. »

« J’ai le droit de me moquer de moi-même mais toi t’as pas le droit ! C’est écrit dans la bible ». Luka s’osa à faire un sous entendu, et bien que la jeune l’ait tout à fait compris elle préféra faire comme si elle n’avait pas la moindre idée de ce qu’il voulait dire. « Dans la mesure où je comptais te noyer dans la baignoire, c’est vrai qu’on ne peut pas vraiment le qualifier de ‘sale’ »

Zénith au contraire de Luka n’avait plus de sentiments. La magie de leur couple s’était, comme qui dirait, envolée quand elle a compris qu’il ne la comprenait pas. Elle ne savait pas pourquoi il s’en prenait tant à Nathan. Après tout il ne pouvait pas être jaloux étant donné que Zé était une hippy et qu’il ne supportait pas ce genre de personne. Tout du moins c’est ce que pensait la jeune femme. Aujourd’hui c’est à Nathan qu’elle confierait sa vie – bien que cela fut toujours le cas. Elle ne pouvait pas définir ce qui la liait à lui. Il était son double, son ange gardien, sa vie. Passer une journée sans le voir relevait de l’impossible. Ils faisaient tout à deux et pourtant ils n’étaient qu’amis. Enfin ils ont tout de même une définition bien à eux de l’amitié.

Elle passa outre la remarque, elle savait qu’il se plaisait à critiquer Nathan. Qu’importe, pour elle il était tout simplement parfait et contrairement à ce qu’il pensait, Nate avait toujours eu ce qu’il voulait. Aujourd’hui il aidait son père c’est tout. Et puis zut, il était parfait point barre ! Par contre sa remarque suivante la gêna un peu. Ils n’étaient plus Zénith et Luka mais l’hippie et le moqueur. Alors c’est comme ça qu’il la considérait maintenant ? Une vulgaire hippie ? Comme si c’était une tare !
« Non je suis parfaite puisque je suis une hippie ça aussi c’est écrit dans la bible. » Elle regretta aussitôt ses paroles. Elle se doutait que Luka avait encore des sentiments à son égard et lui faire croire des choses était cruel. Pourtant Zé n’avait pas fait cela intentionnellement sur ce coup là. Devant la réaction de Luke elle ne put cacher un sourire amusée elle leva les yeux au ciel avant de répondre mystérieusement « va savoir ! » Pour tout avouer oui c’était un compliment. De Luka elle gardait de bons souvenirs qui malheureusement étaient le plus souvent effacé par leur dispute qui avait tout gâché.
Zénith recula de quelques pas en voyant que Luka tiquait sur le sobriquet qu’elle lui avait attribué. Elle aurait du s’y attendre et pourtant sa réaction la surprit grandement. Elle leva les mains en signe de paix avant de les abaisser et de secouer la tête déçue par la fin de sa remarque. « Zen okay ? » Stupide hippie…pourquoi ces deux mots prononcés par Luka la blessait autant ? Peut-être parce que dans le passé, leur histoire s’est terminée ainsi. « Tu me fais pourtant un caprice de bébé boudeur j’ai l’impression »

Zénith croisa les bras sous sa poitrine avant de fusiller littéralement Luka du regard. Il remettait ça. Encore et encore. Zé n’en pouvait plus, s’il continuait sur ce chemin là, elle allait craquer et devenir hargneuse. Avec lui c’était soit tout blanc, soit tout noir elle pouvait très bien faire des effort et être gentille avec lui pour ensuite n’avoir qu’une envie : le bouffer.
Maintenant debout, elle resta tout de même quelques secondes appuyée sur le bras de Luka avant de préférer la compagnie du mur. Mieux valait qu’elle ne reste pas aussi proche de lui. Elle éclata de rire à sa remarque. Son rire enfantin et spontané résonna dans la pièce rapidement. Consciente de n’être pas la plus discrète elle plaqua sa main sur sa bouche avant de regardé gêné Luka. Elle se massa ensuite la nuque avant de répondre penaude à sa question. « Je suis pas vraiment une passionnée de bateau donc excuse-moi de parler avec des mots simples hein. » Elle laissa planer un silence avant de reprendre « Si, j’ai vraiment l’impression qu’on est en pleine mer. A ton avis pourquoi je me tiens au mur ? »

Zénith n’a jamais été de ses filles qui rêvent de vieillir plus vite que la lumière, qui attendent le moment d’être adulte avec impatience. Zé était tout le contraire, si elle le pouvait elle resterait enfant toute sa vie. C’est pour cela qu’elle avait parfois des réactions jugées immatures. Quand ils étaient ensemble Luka avait été plus qu’adorable avec elle et même si elle se souvenait très bien de tous les petits gestes et mots elle avait des réticences aujourd’hui. Etait-il toujours le même ? Ou avait-il changé lorsqu’ils se sont quittés ? Zénith retînt son souffle lorsque la main de Luka s’approcha d’elle, pourtant il voulait simplement être gentil avec lui. Zénith était perdue, comment un garçon comme lui pouvait-il être désagréable quand il s’y mettait ? Elle ne sut que dire à sa remarque et préféra fuir son regard. Il compliquait toujours tout…enfin quand ce n’était pas elle.
Lui parler était quelques choses d’assez étrange, elle en avait perdu l’habitude. Pourtant malgré l’eau qui avait coulé sous les ponts depuis le temps, elle se surprit à se rappeler les détails de la vie de Luka. Comme son père par exemple. Elle grimaça. Un repas avec les Stevenson n’était pas vraiment la meilleure solution. D’une part parce qu’elle n’avait jamais réussi à supporter le caractère un peu trop étouffant de son père et que d’autre part tout cela ne serait pas très sein. Comment tirer un trait sur une histoire si rien ne change ? Elle fit semblant de s’offusquer lorsqu’il parla de son autre modèle à savoir elle-même. Les poings serrés sur les hanches elle aborda une nouvelle fois sa moue fétiche avant de lancer un regard critique à Luka.

« Déjà rien que le mot ‘Zénith’ appelle à l’œuvre d’art. Mais pour la chute je n’en suis pas si sûre…et puis ose faire ça et je.. » Vite elle devait réfléchir à un plan machiavélique. « et je brûle ta maison » Oui niveau crédibilité elle aurait pu trouver mieux.

Ne pouvant rester ne place bien longtemps Zé avait prit la décision de faire quelques pas dans le musée. Bien qu’elle avait l’impression que les murs se rapprochaient d’elle pour l’étouffer, elle continua sa marche jusqu’à ce qu’elle soit frappée non pas par un banc mais par une pensée. Bien entendu tout ce en quoi croyait Zénith n’était que chimère et mensonges pour Luka. A force de baldinguer sa tête en tout sens Zénith n’était plus sûre de l’endroit où elle se trouvait. Inconsciemment elle serra la main de Luka un peu plus fort et se laissa entraîner vers le banc le plus proche. Maintenant assise, elle gardait les yeux fermés ne voulant pas tout voir en double. « Quand on est pas en état de marcher on court génaralement. » Elle se força à ouvrir les yeux et posta son regard sur Luka. « Oui j’y crois à cette histoire. Avoue que c’est tout de même étrange. Leurs vêtements, leurs attitudes…c’est possible tu sais ! »

« La bible ? Euh Zénith t’es vraiment sure que ça va ? Qu’est ce que la Bible vient faire ici ? Tu devrais peut être voir un médecin, ta chute n’a peut-être pas été sans dégâts ! » Ironie ou pas, il montrait qu’il s’intéressait à elle, peut importe ce qu’il devait en récolter, il voyait clairement qu’elle ne lui parler que par strict minimum, parce qu’il se trouvait là, et qu’il n’y avait personne d’autre pour la sortir de là, mais il ne disait rien à ce sujet, en étant tout de même conscient. Sa petite plaisanterie le fit sourire une nouvelle fois, c’était bien trouvé, il pouvait l’admettre, et il répondit du tac au tac : « Tu es tellement chétive, que je n’aurais pas de mal à te plonger dans la baignoire avec moi…T’as raison, y a rien de sale, c’est un bon programme ! »

Les souvenirs avec elle, restaient gravés dans sa mémoire, mais en plus de cela, c’est comme s’il avait exorcisé ces moments dans ses dessins, voilà pourquoi il n’ouvrait jamais son carnet à dessin par l’avant, mais plutôt par l’arrière pour éviter de devoir assister à ces souvenirs qui aussi magiques qu’ils puissent être, le rongeaient de l’intérieur. Le plus rageant pour lui, c’était que même lorsqu’ils étaient ensemble, elle semblait occuper ses pensées par Nathan, il avait toujours eu l’impression que lui seul comptait, et c’était en partie pour ça qu’il était on ne peut plus jaloux, comme oublié…Après, il ne souhaitait pas se sentir responsable de leur rupture, il disait tout le temps que Charlie avait fait penser la balance, et qu’ils étaient bien trop différents…Hippie jusqu’au bout, Zénith n’avait pas supporté que Luka n’en soit pas un, pire encore il les dénigrait, mais il avait appris à faire avec juste pour elle, chose qui ne dura pas…

Leur discussion n’en était pas vraiment une, ils ne cessaient de se contredire, on ne savait pas vraiment où ça les mènerait, ni même pourquoi ils le faisaient, c’était peut-être un règlement de compte ultime depuis leur rupture qui n’était plus des plus récentes… Il tentait de donner des arguments en vain, qu’elle contrecarrait avec la Bible…Intéressant, tous deux ne cherchaient donc qu’à se contredire…La réaction de Luka ne se fit pas attendre, mais se trouvait être étrangement calme :

« Ouais…Tu ne peux prétendre être parfaite si tu as lu la Bible vu que seul Dieu l’est. » Première fois qu’il parlait de la sorte, d’autant plus qu’à chaque fois qu’il lui parlait, il tentait plutôt de se mettre en avant, là rien de tout ça, juste de quoi dénigrer les hippies une fois de plus. La réaction de Zénith concernant la demande de compliment de Luka, obtint un sourire de satisfaction sur les lèvres du jeune Stevenson, il aurait pu avoir d’autres élans de joie, mais il se retint. Ce qui était fou avec ces deux là, c’était à l’image de leurs caractères diamétralement opposés, ils passaient du tout au tout, alors qu’il y avait quelques secondes, il était content, il était à présent presqu’en colère qu’elle l’appelle ainsi, bien qu’en réalité, il était seulement agacé. D’ailleurs Zé, lui demandait d’être Zen, quelque peu apeurée de sa réaction, ce qui ne changea pas pour autant la donne, et il lui répondit sur le même ton : « Je ne serais zen que lorsque j’aurais décidé de l’être. » Il savait que ses mots concernant la qualification des hippies auraient pu avoir une incidence sur leur discussion, mais elle ne releva pas pour autant, preuve d’intelligence. Mais Luka n’avait pas terminé son petit accrochage avec elle, comme quoi il attachait beaucoup d’importance à ce qu’on disait sur lui, et qu’il avait horreur qu’on le critique même pour plaisanter : « T’as fini ? Je ne fais aucun caprice, je t’ai demandé d’arrêter avec ton surnom débile ! Evites ce genre de surnoms ! Que je sache on est plus ens… »

Il n’acheva pas sa phrase, ça le retournait que de le dire, il se contenta juste d’ajouter, avec un envoi de sa main dans le vide : « Tss Laisse tomber ! » Ce regard que Zénith lui envoyait, il l’avait vu des dizaines de fois déjà, c’était à chaque fois le même lors de leurs disputes…Oui il continuait de dénigrer ouvertement les hippies, il se disait que de toute manière à quoi bon changer, alors qu’ils ne seraient plus jamais ensemble ? Tous les deux étaient adossés contre le mur, mais elle s’appuyait à présent sur l’épaule du jeune homme, qui fut visiblement très étonné de cela, jetant alors un regard vers Zénith, mais ce moment de petite affection ne dura pas. Elle éclata ensuite de rire, inutile de préciser que depuis le début, ces deux là dérangeaient tout le monde, mais il ne s’en formalisa pas il n’en avait rien à faire, et voyant le regard gêné de Zé, il lui assura : « T’es pas dans une bibliothèque, tu peux te permettre de faire du bruit ! » Elle n’était pas une fan de bateau…Vraiment ? Que faisait-elle ici alors ? Luke s’en amusa : « Moi non plus, et pourtant même moi qui n’écoute jamais rien, je le sais, alors tu devrais avoir honte ! » Un petit rire s’échappa du large sourire du jeune Stevenson, visiblement de meilleure humeur depuis peu. « Tu te tiens au mur simplement parce que tu ne marches pas droit à cause de la chute, si j’étais toi j’irais vite au toilettes, tu dois avoir le mal de mer ! » Petite plaisanterie, dont il espérait un effet de détente de l’atmosphère. Et il ajouta : « Mais si tu as besoin de mon aide tu peux compter sur moi… » Que cherchait-il ? Visiblement il cherchait à rattraper le temps perdu…

Car ce temps perdu, il le regrettait amèrement, c’était fou tout de même, il avait rencontré Charlie avant, et bien qu’il ait tenu à elle, ce n’était pas comme avec Zénith. C’était plus particulier, il aimait la protéger, s’en occuper comme sa petite sœur, et il ressentait bien plus à son égard, une chose inexplicable qu’il avait compris peut être trop tard. Sa présence lui faisait du bien, mais aussi du mal, car il vivait dans le passé, la concernant. C’était peut être l’une des premières fois qu’il avait été si démonstratif, c’était durant leur relation, il s’était ouvert, lui qui était réticent à exposer le moindre de ses sentiments. Paradoxalement il ne lui avait jamais dit à quel point elle comptait pour lui, c’était peut être la raison qui ne l’avait pas retenue, mais pour lui elle aurait du s’en douter. Lui en revanche se doutait bien que le silence qui pesait à présent dans le musée était en partie à cause de sa phrase, mais peu lui importait, c’était fait. Pas sur qu’il recommence en revanche, ça le tiraillait au ventre de voir à quel point elle n’avait plus confiance en lui. Peut être qu’il commençait à se rendre responsable en fin de compte.

Enfin, elle se mit à changer de sujet, ignorant totalement ce que Luka avait dit concernant son père, ou du moins feignant de s’y intéresser par une grimace, ça aussi, il pouvait le comprendre. Un sourire amer, non pas parce que sa plaisanterie était de mauvaise augure, mais qu’il ressentait un profond malaise soudainement, si elle savait qu’il l’avait dessinée de nombreuses fois…Quelle aurait été sa réaction ? Il ne voulait pas savoir, il avait peur à vrai dire. Il répondit tout de même de bon cœur :

« Oui à la perfection, mais un détail rendrait la chose plus parfaite : Moi ! » Il finit sa phrase avec un grand sourire montrant qu’il tenait à plaisanter. Puis il reprit : « Brûles ma maison, et je…te force à te marier avec moi juste après ce qui fait que tu seras mariée à un clochard ! » Quelle mauvaise plaisanterie de sa part, il ne s’abaissait jamais à se dénigrer, c’était la première fois, qu’avait-il en tête ?

On voyait de nouveau la différence entre la cadette Weller et l’unique Stevenson. Elle croyait en des choses que lui ne pouvait admettre. Il ne croyait quasiment en rien, la mort de sa mère par sa venue au monde lui avait fait écarter toute notion originale, et il gardait les pieds sur terre…Sauf qu’il n’avait pas forcément raison. Luka venait d’attraper la main de Zé’ et il la surprit en train de la tenir toujours plus fort, ce qui lui provoqua une drôle de sensation : elle avait besoin de quelqu’un en ce moment, et le seul qui fut capable d’y être c’était lui. Il rit à la remarque de Zénith quand celle-ci atteint le banc : « A parce que tu préfères courir dans un cas comme celui-ci pour te vautrer de nouveau ? » Luka jeta un regard furtif vers leurs mains, qui se tenaient toujours fermement l’une à l’autre, et bien sur il ne chercha pas à l’enlever. Elle lui argumenta la chose, il se mit à réfléchir et lui répondit : « Faudrait vraiment que j’en vois un pour avoir un jugement…Mais pour moi ça serait pas impossible remarque, et là tu reconnaitrais que le progrès c’est mieux que la paix ! »